le soleil et la peau
À propos de cet article :
Dr Jean-Luc SCHMUTZ
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Résumé
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Le soleil induit sur notre organisme des effets bénéfiques et nocifs.
Au-delà des ses effets positifs sur le moral, le soleil est avant tout la cause principale du vieillissement prématuré de la peau et des cancers cutanés.
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Un peu d’histoire
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Au début du XXème siècle…
C'est au début du 20ème siècle que les scientifiques ont commencé à s'intéresser aux bienfaits de la lumière pour traiter certaines maladies. Ainsi, en 1903, Niels Finsen, un chercheur danois, a reçu le prix Nobel de médecine pour l'utilisation de la thérapie ultraviolette dans le traitement du lupus. À partir des années 60, les médecins commencent à se rendre compte de l'importance du nombre de cas de cancers de la peau dans les professions très exposées au soleil, tels les marins et les agriculteurs. On parle même d'épidémie chez ces travailleurs très exposés malgré eux. C'est depuis cette époque que les dermatologues parlent des dangers des coups de soleil, des rayons UVA et B, et de la nécessité de la photoprotection.
Aux États-Unis d'Amérique
Aux Etats-Unis, un cancer de la peau est diagnostiqué chaque année chez près d'un million de personnes et les prévisions annoncent qu'un Américain sur 5 sera touché par cette maladie au cours de sa vie. Dans d'autres pays très ensoleillés, comme l'Australie, où le taux de cancer de la peau est parmi les plus élevés au monde, les instances de sécurité sanitaire ont mis en place des actions de prévention très importantes, telles que l'utilisation de maillots de bain réalisés dans des tissus spéciaux, « sun-proof », pour protéger les enfants au maximum. Aujourd’hui, tous les équipementiers sportifs proposent des vêtements anti-UV notamment des tee-shirts car il faut savoir que la meilleure photoprotection est vestimentaire, aussi bien chez l’enfant que chez l’adulte.
En France
Dans de très nombreux pays, les médecins sont partis en guerre contre les instituts de bronzage qui peuvent provoquer les mêmes méfaits que l’excès de soleil. En France, l’ANSES (Agence nationale de Sécurité Sanitaire) préconise l’interdiction des cabines de bronzage, celles-ci sont actuellement interdites en Australie et au Brésil. Aujourd’hui, on estime l’incidence des cas de mélanomes liés aux cabines de bronzage entre 91 et 350 cas et le taux de décès annuel entre 19 et 76 cas en France.
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Comprendre l’action des UV
et leur impact sur la peau
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Comprendre l'action des ultraviolets
Les mécanismes d'action des rayonnements ultraviolets (UV) sur la peau sont aujourd'hui bien connus. Les rayons du soleil sont composés de particules énergétiques : les photons ; ils ont différentes longueurs d'onde, et parmi eux, les rayons invisibles ultraviolets (UVA, UVB) et les infrarouges peuvent plus ou moins pénétrer dans la peau.
Les UVB sont arrêtés dans l'épiderme en majorité et seuls 10% atteignent les couches profondes de la peau. Les UVA en revanche pénètrent directement dans les couches les plus profondes de la peau et tout particulièrement le derme. Les autres rayonnements de type infrarouge peuvent atteindre des couches encore plus profondes. Par conséquent, les UVB font des dégâts épidermiques, tandis que les UVA entrainent des modifications dermiques notamment au niveau du tissu élastique.
Lorsque les UVB entrent dans les cellules, ils sont absorbés par différentes molécules présentes dans celles-ci. Concrètement, soit la cellule meurt car sa membrane a été atteinte, soit une partie de l'ADN est modifiée, conduisant ensuite à des mutations plus ou moins importantes de la cellule. Ces mutations peuvent conduire à long terme à la formation d'une cellule cancéreuse qui se multipliera et formera une tumeur du type carcinome ou mélanome.
Les UVA agissent un peu différemment. Ils provoquent l'activation des radicaux libres dans les cellules profondes de la peau. Ces radicaux libres sont toxiques et vont à leur tour attaquer l'ADN, modifier le fonctionnement de la cellule ou la tuer.
L'organisme possède quelques armes contre les UV :
- Les cellules mélanocytaires produisent les pigments de la peau, les grains de mélanine, capables d'arrêter une partie des rayons du soleil. La mélanine absorbe les photons, disperse leur énergie sous forme de chaleur et capte les radicaux libres formés par cette réaction. Ainsi, la pigmentation naturelle (couleur de la peau) est le facteur essentiel des capacités spontanées de protection contre les rayons UV. C'est pourquoi les cancers de la peau prédominent chez les sujets blancs à la peau claire (blond ou roux qui ne bronzent pas ou peu), vivant au soleil.
- Les antioxydants (vitamine E, vitamine C) et les caroténoïdes (contenus dans les fruits et légumes de couleur rouge orangée) peuvent protéger contre les méfaits des UVA.
Il est à noter que chez les individus roux, la majorité des pigments de la peau sont de la phéomélanine c'est-à-dire une mauvaise mélanine rouge qui ne protège pas contre les effets du soleil.
Les individus à peau foncée ont, quant à eux, une très grande majorité d'eumélanine, un pigment brun qui protège très efficacement contre les UV.
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Exposition au soleil
Les risques
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Selon les Phototypes
La couleur de la peau, des yeux et des cheveux permettent de définir différents types de peau par rapport à sa réaction au soleil. Ceci détermine 6 phototypes :
- 0 = Albinos = dépourvus de mélanine
- 1 = Roux = coups de soleil sans bronzage
- 2 = Blonds aux yeux clairs = coups de soleil, puis léger bronzage
- 3 = Châtains = coups de soleil, puis bronzage
- 4 = Bruns = bronzage sans coup de soleil
- 5 = Méditerranéens, métis = idem
- 6 = Noirs = idem
En France, les phototypes 2 et 3 sont majoritaires, c'est-à-dire que la plupart des sujets ont une relative fragilité vis-à-vis du soleil.
Des méfaits des ultraviolets
Les UVB sont les responsables des coups de soleil et les UVA du vieillissement cutané et sont également responsables des allergies solaires.
L’excès d’exposition aux UVA et UVB est la principale cause de survenue de cancers cutanés. Il apparaît donc capital de se protéger des excès solaires durant toute la vie pour limiter ces risques.
Médicaments et soleil
Du fait de la prise de certains médicaments, le soleil peut entraîner des réactions appelées suivant le mécanisme en cause, phototoxicité ou photoallergie.
Il est important de consulter rapidement son médecin traitant ou son dermatologue pour en identifier les médicaments responsables
La photosensibilisation médicamenteuse peut se manifester de deux façons :
- Une réaction phototoxique se manifeste par le fait qu'une très faible « dose » de soleil suffit à provoquer des réactions de type « coups de soleil » du fait de la présence d'un médicament qui multiplie les méfaits du soleil sur la peau. Les médicaments responsables de ces effets sont bien connus des médecins. Il est donc important de se protéger très efficacement de l'exposition solaire lorsque l'on doit prendre l'un d'entre eux.
- Une réaction photoallergique, c'est-à-dire que le médicament en cause est transformé par l'organisme en un produit qui réagit négativement sous l'effet du soleil et provoque alors une réaction allergique. C'est une réaction plus rare.
Lorsque l'on prend des médicaments et qu'une manifestation cutanée anormale paraît provoquée par le soleil, il faut bien évidemment arrêter toute exposition au soleil et consulter rapidement son médecin traitant pour en identifier le médicament responsable et prendre cette manifestation en charge.
Les lucites solaires
Il existe plusieurs allergies au soleil, appelées lucites. La plus fréquente est la « lucite estivale bénigne », qui touche une femme sur 10 entre 17 et 40 ans, soit près de 900 000 personnes chaque année.
Elle se développe sous l'influence des UVA et se manifeste sous la forme d'une éruption de petits boutons qui démangent. Cette allergie est plus visible sur le décolleté, le haut du dos, les avant-bras et les jambes, soit les endroits les plus exposés au soleil. Elle peut diminuer ou au contraire s'aggraver d'année en année.
En cas de poussée, le médecin peut être conduit à prescrire des antihistaminiques oraux et une crème à base de corticoïdes. Lorsque cette lucite est importante, il peut aussi être conduit à prescrire un traitement préventif oral (antipaludéens ou caroténoïdes) et dans tous les cas, des produits solaires de forte protection (50 ).
Les photodermatoses métaboliques
Beaucoup plus rares, elles touchent surtout les enfants et peuvent être des lucites hivernales bénignes, des porphyries cutanées, une hydroa vacciniforme… Il peut également s’agir d’une allergie ou d’une photoallergie à certains composants des crèmes solaires qui provoquent des rougeurs ou des démangeaisons sur les lieux d'application de la crème et après exposition au soleil. Il est indispensable d'en parler à son dermatologue pour qu'il conseille à l'enfant une crème adaptée à son type de peau.
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Le cas des cabines à UV
Attention danger
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Un marché avant tout
La peau hâlée toute l'année, c'est le rêve de certaines personnes qui se sentent mieux dans leur corps dès que leur peau est un peu plus foncée. C'est pour répondre à ce « marché » que les cabines de bronzage se sont multipliées. En 1994, on estime que 6.4 % de la population française s'exposait aux UV artificiels selon une étude de l'EORTC, l'Organisation européenne pour la recherche et les traitements du cancer.
Cette pratique est à l’origine d’un chiffre d’affaires global estimé à 231 millions d’euros dans cette industrie. Le nombre de cabines de bronzage utilisées en France est aujourd’hui de 15600. Le risque d’utilisation de ces cabines est bien sur la survenue d’un cancer et notamment d’un mélanome. D’après les chercheurs, le nombre de décès par mélanome attendu en France dans les 30 prochaines années est estimé entre 566 et 2288 si les habitudes d’exposition aux UV des cabines de bronzage ne changent pas.
Comment ça marche et pourquoi c'est dangereux
Ces appareils sont des sortes de boîtes rectangulaires dans lesquelles on peut s'allonger pour bronzer quelques minutes. Des lampes de chaque côté diffusent des rayons UV. Les lampes utilisées pour le bronzage sont des lampes à décharge : les rayonnements, UV et visibles, sont émis par action d'une décharge électrique au sein d'un gaz. On distingue les lampes à « basse pression » et les lampes à « haute pression ». Les lampes basse pression émettent un rayonnement dont le spectre s'étale principalement dans l'UVA et le visible. Les lampes haute pression comprennent un filtre qui permet de sélectionner les longueurs d'ondes émises ; si le filtre est défectueux, le rayonnement peut contenir une proportion importante d'UVB et d'UVC, particulièrement dangereux pour la santé.
La Direction générale de la santé déconseille fortement l'exposition aux UV à des fins esthétiques !
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Quels sont les conseils à suivre ?
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Les autobronzants sont des cosmétiques permettant d'obtenir un aspect bronzé, sans les méfaits du soleil. Ces crèmes et fluides agissent par un phénomène chimique et colorent les cellules mortes à la surface de la peau et ne sont pas dangereux. En revanche, ils peuvent êtres révélateurs de points noirs sur le visage. En effet, les points noirs sont des accumulations de cellules mortes, qui se colorent d'avantage après l'application d'un autobronzant. Ces cosmétiques n'agissent en aucun cas sur la production de mélanine et ne sont pas des protections solaires (sauf quand ils sont associés à une protection UV).
Les dix commandements du bon usage de l'exposition au soleil
90 % des Français savent que le soleil est dangereux pour la santé. 70% des femmes ont modifié leur comportement ces dix dernières années, et protègent principalement leurs enfants. Les hommes sont un peu moins bons élèves… Voici la liste des bons comportements à adopter sous le soleil.
- Apprécier sa sensibilité personnelle au soleil : peau mate, brune ou blonde, et pratiquer des expositions d'autant plus progressives que le phototype est plus clair.
- Éviter le soleil pendant les heures les plus chaudes l'été (entre 12 h et 16 h), car ce sont les heures les plus riches en rayons brûlants.
- Ne pas rester sur la plage des heures entières et ne pas dépasser une heure de bain de soleil par jour, les mélanocytes ayant recueilli la dose de soleil suffisante pour un bronzage de qualité.
- Préférer pour bronzer le soleil du matin ou de la fin de l'après-midi, pour bénéficier de la filtration des UV par l'atmosphère.
- Utiliser systématiquement la protection par les vêtements : chapeau à bord large, tee-shirt, pantalon et ne pas oublier la protection oculaire (casquette, lunettes de soleil).
- Se méfier des circonstances comportant un risque supplémentaire ou une fausse sécurité : vent frais, couverture nuageuse faible, sol réfléchissant (neige, sable, eau), altitude.
- Ne pas s'exposer après l'application de produits parfumés ou lors de la prise de certains médicaments photosensibilisants (demander conseil à son médecin ou à son pharmacien).
- S'essuyer soigneusement après chaque bain ou mieux, se rincer à l'eau douce car les gouttelettes d'eau ont un effet réfléchissant favorisant les coups de soleil et amenuisant l'efficacité des produits solaires.
- Appliquer les produits solaires avant de sortir (pour éviter le « coup de soleil surprise » lors des promenades) et renouveler l'application toutes les deux heures et après chaque bain.
- Appliquer régulièrement des produits solaires performants (adaptés à votre phototype et aux conditions d'ensoleillement) dont le but n'est pas de faire prolonger le temps total d'exposition ni de promouvoir un bronzage intense, mais de permettre une exposition raisonnable sans risque.
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La prévention
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Les protections solaires
Si la majorité des Français connaissent les méfaits du soleil, les mesures de protection qu'ils utilisent ne sont souvent pas suffisantes. Les produits de protection solaire sont très efficaces, mais nécessitent d'être appliqués très régulièrement et à bonne dose.
Une crème solaire est composé d’un mélange de filtres chimiques invisibles et de filtres minéraux (dioxyde de titane et oxyde de zinc) qui donnent un aspect un peu opaque. Les crèmes solaires doivent protéger contre les UVB et contre les UVA.
L'indice de protection, appelé SPF pour Sun Protection Factor (facteur de protection solaire), indique la quantité de soleil qu'il faudrait recevoir pour attraper un coup de soleil après avoir appliqué la crème. Par exemple, une crème solaire de coefficient 30 indique que l'application de la crème multiplie par 30 la dose d'UVB nécessaire pour provoquer un coup de soleil.
Cet indice matérialise l'efficacité de la protection, mais il faut savoir que les tests permettant de déterminer ce coefficient sont effectués en laboratoire sur la base de l'application d'une couche épaisse de 2 mg de crème par cm2 de peau (pour obtenir cette dose, il faut étaler un volume de crème équivalent à celui d'une balle de ping-pong pour protéger un adulte). En règle générale, la quantité de crème appliquée sur la peau est d'environ 1 à 0,7 mg/cm² et donc, dans la pratique, l'indice réel est divisé par 2 ou par 3 et une crème d'indice SPF 30 devient donc équivalente à une crème d'indice 10 utilisée à la dose de 2 mg/cm2.
L'écran total, une fausse promesse
L’appellation « écran total » n’est plus autorisée en France car aucune crème ne protège complètement contre le soleil. Les crèmes à indices très élevés qui revendiquaient ce terme incitaient en fait les utilisateurs, qui pensaient être entièrement protégés, à rester trop longtemps au soleil. C’est pourquoi existe aujourd’hui, selon les recommandations européennes, une indication par catégorie : 6-10 faible protection, 15-25 protection moyenne, 30-50 haute protection et 50+ très haute protection.
Aux Etats-Unis, les méthodes de validation de photoprotection et la liste des filtres autorisés sont différentes ; on y trouve donc des crèmes à indices supérieurs à 70, sans qu'elles ne protègent aussi efficacement que des crèmes d'indice 50 européennes.
À appliquer sans modération
Dès les premiers rayons du printemps, et jusqu'à ce que l'intensité des rayons UV diminue à l'automne, la protection solaire est vivement conseillée. Les bulletins météorologiques donnent désormais l'indice sur une échelle de 1 à 12. À partir de 5, la protection solaire est recommandée.
Toute application de protection solaire doit être renouvelée régulièrement, toutes les 2 heures environ, en cas d'exposition continue. Par ailleurs, beaucoup de crèmes solaires promettent une résistance à l'eau, mais pourtant, selon les dernières données de l'AFSSAPS (Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé), l'efficacité de protection solaire de toutes les crèmes est diminuée de 90% après 30 minutes d'activité physique. Il est donc primordial d'appliquer à nouveau de la crème régulièrement entre les baignades ou après une activité physique.
Hydratation et prévention du vieillissement cutané
Les rayons ultraviolets agissent sur les cellules de la peau et brisent les chaînes d'ADN qui sont en permanence réparées par des enzymes. Mais ce mécanisme peut vite être débordé en cas d'exposition prolongée. Par conséquent, si les cellules de la couche basale, qui assurent le renouvellement cutané, sont atteintes, la production de mélanine, de collagène et d'élastine diminue : c'est l'élastose solaire. La peau devient sèche et moins élastique, elle se pigmente de petites taches, les rides sont plus marquées… Les excès de soleil accélèrent donc très nettement le vieillissement de la peau.
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