La prévention

Une exposition excessive aux UV, qu’elle soit chronique ou occasionnelle, d’origine professionnelle ou liée aux loisirs, pendant l’enfance ou à l’âge adulte, est associée à une augmentation du risque de carcinomes cutanés. Il est donc recommandé, en particulier pour les personnes à risque, d’éviter de s’exposer au soleil entre 10 h et 16 h, de porter un chapeau couvrant bien la nuque et les oreilles, et d’appliquer une crème solaire protégeant efficacement contre les UVA et les UVB. L’utilisation des cabines de bronzage est fortement déconseillée.

La chirurgie d’exérèse du carcinome cutané

Il est reconnu par l’ensemble des médecins spécialisés dans la prise en charge des cancers cutanés que le traitement standard des carcinomes basocellulaires et épidermoïdes cutanés est avant tout chirurgical. Les autres modalités de traitement sont réservées à des formes ou des terrains particuliers. Pour la majorité des carcinomes, la chirurgie est efficace pour traiter la tumeur, avec un retentissement esthétique et fonctionnel généralement très faible.

La chirurgie des carcinomes suit des règles précises :  

L’une des plus importantes consiste à pratiquer une exérèse qui dépasse le périmètre visible de la lésion. En retirant également une zone de tissu sain autour de la tumeur, à la fois en surface et en profondeur — ce que l’on appelle la marge d’exérèse —, le chirurgien réduit le risque de récidive à partir de cellules anormales éventuellement présentes en périphérie de la lésion.

Pour les carcinomes basocellulaires, cette marge d’exérèse varie de 3 à 10 mm, selon la localisation, le type clinique et les caractéristiques observées au microscope. Pour les carcinomes épidermoïdes cutanés, la marge minimale est de 5 mm, mais elle est souvent portée à 10 mm ou plus.

L’intervention est réalisée par un médecin expérimenté dans le traitement des cancers de la peau et en chirurgie cutanée, le plus souvent un dermatologue ou un chirurgien plasticien.

Conjuguer de bons résultats carcinologiques et esthétiques :

En fonction de la taille de la tumeur, de sa localisation et de la marge d'exérèse requise, la taille de la zone de peau à retirer peut varier considérablement. Ce sont donc ces trois éléments qui détermineront le type d'intervention.

Chaque fois que cela est possible sur le plan fonctionnel et esthétique, la zone d'exérèse bénéficie d'une simple suture, ce qui permet d'obtenir des cicatrices moins visibles. Dans ce cas, la guérison se fait en une semaine à dix jours.

Si la suture simple n'est pas possible, plusieurs options sont envisageables. On peut laisser la cicatrisation se faire naturellement avec l'aide de pansements gras cicatrisants "interface", ce qui permet souvent d'obtenir une cicatrice de bonne qualité, mais cela nécessite un délai de deux à deux mois et demi. Une autre possibilité est de recouvrir la zone opérée par un morceau de peau prélevé dans une zone voisine (technique des lambeaux cutanés), ou encore d'avoir recours à une greffe de peau prélevée sur le patient, avec des délais de cicatrisation d'environ trois semaines pour les lambeaux et deux mois pour les greffes.

Un suivi clinique rapproché :

Une fois la lésion retirée, le patient doit être suivi régulièrement pour repérer une éventuelle récidive (tous les 6 mois la première année, puis sur une base annuelle) ou l’apparition d’une nouvelle lésion. Il est important de savoir que si une personne a déjà eu un carcinome cutané, elle présente un risque accru de développer un autre carcinome.

Une intervention en un ou deux temps :

Dans les cas les plus simples et pour les lésions de petite taille, généralement jusqu’à 5 mm, le traitement se fait en un seul temps, la biopsie étant réalisée en même temps que l’acte chirurgical d’exérèse. Pour les lésions plus évoluées ou situées dans des zones où il est esthétiquement ou fonctionnellement difficile de procéder à une intervention large, l’acte chirurgical intervient en général après une biopsie initiale de petite taille.

Dans les cas où l’épargne de la peau est importante fonctionnellement ou esthétiquement, l’acte chirurgical se fait souvent en passant au plus près de la tumeur. Il arrive que l’examen histologique de la pièce opératoire indique une marge d’exérèse insuffisante pour garantir un acte curatif, ce qui impose une réintervention chirurgicale.  

Il est possible de contourner cette difficulté de deux façons :

  1. En prévoyant d’emblée une chirurgie en deux temps, c’est-à-dire ablation de la lésion avec les marges d’exérèse qui semblent appropriées, puis attente des résultats de l’examen histologique avant de refermer la zone d’intervention ou, si nécessaire, d’enlever un supplément de peau pour arriver en zone saine. En attendant le résultat de l’analyse histologique, un pansement gras est appliqué sur la zone opérée pour éviter l’infection et faciliter la cicatrisation ultérieure.
  2. En ayant recours à une technique chirurgicale dite de Mohs (du nom du chirurgien qui l’a développée), au cours de laquelle les bords de la zone enlevée sont examinés au microscope « en temps réel ». Ceci permet au chirurgien de compléter progressivement son geste jusqu’à ce qu’il soit sûr d’être en zone saine de tous les côtés de l’exérèse. Cette chirurgie, techniquement plus lourde, est peu développée en Europe du fait d’indications limitées. Elle est cependant plus pratiquée aux États-Unis.

Compte tenu du degré élevé de sophistication de ces deux alternatives, elles sont en pratique réservées aux lésions qui ont un risque élevé de récidive en cas d’exérèse incomplète.

3. Les autres possibilités thérapeutiques pour les formes superficielles

Les traitements chimiques :

Pour les tumeurs superficielles (carcinomes basocellulaires superficiels, kératoses solaires ou actiniques, maladie de Bowen ou carcinomes épidermoïdes cutanés in situ), il existe également deux types de traitements chimiques : l'imiquimod et le 5-fluorouracil.

La photothérapie dynamique :

Il existe aussi une méthode de traitement combinant agents chimiques et physiques, intitulée photothérapie dynamique. Cette méthode consiste à appliquer une crème photosensibilisante sur la lésion, puis à irradier celle-ci avec une source lumineuse appropriée quelques heures après l'application. Cela permet la destruction des cellules cancéreuses. Les résultats sont très bons sur les carcinomes superficiels.

D'une façon générale, les traitements chimiques et la photothérapie dynamique sont surtout indiqués chez les sujets présentant des carcinomes superficiels à répétition. Ces traitements constituent des alternatives à des actes chirurgicaux répétitifs, mais nécessitent une surveillance très stricte des patients traités, car le risque de récidive est plus important qu'avec la chirurgie.

La cryothérapie :

La cryothérapie peut également être proposée pour les carcinomes basocellulaires superficiels. Elle a l'avantage de pouvoir être réalisée en consultation. Dans 80 % des cas, elle est efficace mais peut laisser une cicatrice dépigmentée.

Traitement des formes avancées ou métastatiques

La radiothérapie :  

Si l'ablation chirurgicale de la tumeur n'est pas possible pour des raisons techniques ou si elle est contre-indiquée, il est possible d'avoir recours à la radiothérapie du carcinome, qui donne cependant de moins bons résultats à la fois sur le plan du contrôle du cancer et sur le plan esthétique. Cette technique est employée essentiellement chez les sujets très âgés inopérables et en cas de tumeurs trop volumineuses pour être opérées sans séquelles majeures.  

Elle est également indiquée en cas d’infiltration péri nerveuse de la tumeur.

La radiothérapie des ganglions lymphatiques peut être envisagée lorsque plusieurs ganglions sont touchés par le cancer, ou si la tumeur a endommagé ces ganglions (on parle dans ce cas d’effraction capsulaire).

Les thérapies ciblées : 
Depuis quelques années, des thérapies ciblées sont développées pour traiter les formes avancées ou métastatiques de carcinomes cutanés. Ces traitements ciblent spécifiquement les anomalies moléculaires responsables de la tumeur, ce qui permet d’être plus efficace et mieux toléré que les chimiothérapies classiques.

  • Dans le cas des carcinomes épidermoïdes cutanés, la voie de l'EGFR (récepteur du facteur de croissance épidermique) est généralement ciblée. Des inhibiteurs spécifiques, tels que le cetuximab et le gefitinib, sont utilisés pour bloquer ce récepteur. Selon plusieurs études, l'association du cetuximab à une polychimiothérapie pourrait améliorer la survie sans progression de la maladie, comparativement à l'utilisation du cetuximab seul.
  • Dans le cas des carcinomes basocellulaires : Les inhibiteurs de la voie Hedgehog, comme le vismodegib et le sonidegib, sont des traitements ciblés développés pour certains carcinomes basocellulaires avancés. Ces molécules agissent en bloquant une voie de signalisation anormalement activée dans la majorité des CBC, la voie Hedgehog, impliquée dans la croissance incontrôlée des cellules tumorales. Le vismodegib (Erivedge®) et le sonidegib (Odomzo®) ciblent spécifiquement la protéine SMO (Smoothened), un acteur clé de cette voie. En France, ces traitements sont autorisés pour les CBC localement avancés non opérables ou non accessibles à une radiothérapie, ainsi que pour les formes métastatiques. Les études cliniques ont montré une efficacité notable : environ 60 % de réponse objective pour le vismodegib dans les formes localement avancées, et des résultats comparables pour le sonidegib. Ces médicaments permettent souvent une réduction significative de la taille des tumeurs, voire une disparition complète dans certains cas. Cependant, ils peuvent entraîner des effets secondaires (crampes musculaires, perte de goût, fatigue, perte des cheveux) qui nécessitent une surveillance attentive.

L’immunothérapie :

  • Dans le cas des carcinomes épidermoïdes cutanés :

L’immunothérapie, en particulier avec les anti PD1 tels que le cemiplimab et le pembrolizumab, a récemment remplacé la chimiothérapie dans le traitement des carcinomes épidermoïdes cutanés localement avancées ou métastatiques.

Des études sont également en cours pour déterminer l’efficacité de ces traitements avant ou après la chirurgie.  

Les anti-PD1 semblent offrir des réponses durables chez environ la moitié des patients traités pour un CEC inopérable, qu’il soit localement avancé ou métastatique.  

Le cemiplimab est indiqué pour les CEC avancés, qui ne peuvent être guéris par chirurgie ou radiothérapie et qui ne peuvent pas être traités par chimiothérapie, en raison d’un échec ou d’une contre-indication.  

De son côté, le pembrolizumab est utilisé en première ligne dans les carcinomes épidermoïdes cutanés de la tête et du cou métastatiques ou en rechute inopérable (tumeurs exprimant le PDL1 avec un score combiné positif CPS supérieur ou égal à 1).

  • Dans le cas des carcinomes basocellulaires :  

Des recherches sont également en cours pour explorer l’utilisation de l’immunothérapie dans le traitement des carcinomes basocellulaires.

La chimiothérapie :

La chimiothérapie n’est plus utilisée en première intention pour les carcinomes épidermoïdes cutanés avancés. Elle peut toutefois être envisagée dans les formes localement avancées ou métastatiques, notamment si la chirurgie ou l’immunothérapie sont impossibles ou inefficaces. Elle est parfois utilisée en amont d’une chirurgie (traitement néoadjuvant) pour réduire la taille de la tumeur, ou en association avec la radiothérapie (radiochimiothérapie) dans les formes inopérables. 

info Conseils

Les promesses n' engagent que ceux qui les écoutent.

À ce jour, aucun moyen médicamenteux ou nutritionnel permettant de bronzer sans risque n’a fait la preuve de son efficacité dans la prévention des cancers cutanés.

Les pilules de bronzage à base de carotène donnent certes un teint hâlé, mais elles n’empêchent pas les coups de soleil. De plus, rien ne prouve qu’un apport accru en bêta-carotène réduise le risque de cancers cutanés.

Seule une exposition raisonnée et modérée aux rayons UV solaires, associée à une protection efficace, permet de réduire le risque de carcinomes cutanés.

 

Surveiller sa peau de près

Face à une lésion cutanée chronique qui évolue, s’ulcère ou saigne, il est essentiel de consulter rapidement un médecin afin de permettre un diagnostic précoce et, par conséquent, un traitement simple et efficace.