info Résumé 

Le carcinome épidermoïde cutané (CEC) invasif est l'un des cancers de la peau les plus fréquents, en particulier chez les personnes à peau claire, représentant environ 20 % de toutes les tumeurs malignes cutanées. Plusieurs facteurs peuvent favoriser son apparition, tels que l’exposition prolongée au soleil (rayons ultraviolets), le vieillissement prématuré de la peau, l’âge, le sexe masculin, un système immunitaire affaibli, le tabagisme, ainsi que des prédispositions génétiques. 

Dans la majorité des cas, le CEC a un bon pronostic, avec un taux de guérison à 5 ans supérieur à 90 % et un faible risque de métastases (moins de 4 %). Il existe deux types de CEC : les formes peu invasives, qui sont les plus courantes, et les formes plus graves, dites avancées, qui incluent le CEC localement avancé et le CEC métastatique, lorsque la tumeur se propage à d'autres parties du corps. 

Le traitement repose principalement sur une intervention chirurgicale visant à retirer la lésion dans son intégralité, ainsi qu’une marge de tissu sain autour. 

Le carcinome basocellulaire (CBC) est le cancer de la peau le plus fréquent, particulièrement chez les personnes à peau claire. Il représente environ 70 à 80 % de toutes les tumeurs cutanées. Plusieurs facteurs favorisent son apparition, notamment une exposition prolongée aux rayons ultraviolets du soleil, l’âge avancé, un système immunitaire affaibli, ainsi que certaines prédispositions génétiques. 

Le CBC se développe généralement lentement et a un excellent pronostic, avec un très faible risque de métastases, inférieur à 1 %. Toutefois, il peut causer des destructions locales importantes s’il n’est pas traité à temps. Il existe plusieurs formes cliniques de CBC, allant des lésions superficielles à des formes plus infiltrantes. Certaines formes avancées sont à prendre en charge.  

Le traitement repose principalement sur une intervention chirurgicale visant à retirer la lésion dans son intégralité, ainsi qu’une marge de tissu sain autour.  

La prévention des carcinomes repose essentiellement sur une protection solaire rigoureuse. Qu’il s’agisse de carcinomes épidermoïdes cutanés ou de carcinomes basocellulaires, adopter des mesures de protection contre les rayons UV du soleil permet de réduire significativement le risque de leur développement. Cela implique d’éviter les expositions prolongées au soleil, en particulier aux heures les plus intenses, et d’utiliser régulièrement des crèmes solaires à indice de protection élevé contre les UVA et les UVB, adaptées au type de peau. 

Introduction  

Les carcinomes cutanés sont les plus fréquents des cancers de l' adulte (30% de tous les cancers), et sont aussi les plus fréquents des cancers de la peau.

Deux grands types de cancers se développent à partir des cellules de l' épiderme, ou kératinocytes, les carcinomes basocellulaires et les carcinomes épidermoïdes cutanés. Ils diffèrent par leur comportement et leur pronostic. Les carcinomes annexiels, quant à eux, se développent à partir des annexes cutanées (poils, glandes sébacées ou sudoripares) et sont beaucoup plus rares (ils ne seront donc pas abordés ici).

Les carcinomes cutanés concernent le plus souvent les personnes âgées de plus de 50 ans, surtout à partir de 60-65 ans pour les carcinomes épidermoïdes cutanés. Ils touchent aussi bien les hommes que les femmes, avec toutefois une prédominance masculine. 

Qu’est-ce que c’est ?  

Le carcinome épidermoïde cutané (anciennement dénommés spinocellulaires)

Il existe différentes formes de carcinomes épidermoïdes cutanés.  

La forme la plus superficielle est appelée carcinome in situ, également connue sous le nom de maladie de Bowen. À ce stade, les cellules cancéreuses sont limitées à la couche supérieure de la peau.

Lorsque le carcinome progresse, il peut devenir invasif, c’est-à-dire que les cellules cancéreuses pénètrent plus profondément dans les tissus cutanés.

Parmi les formes invasives, on parle de carcinomes épidermoïdes cutanés avancés dans deux situations :

  • lorsque la tumeur ne peut pas être retirée par chirurgie ni traitée efficacement par radiothérapie (on parle alors de CEC localement avancé) ;
  • ou lorsque le cancer s’est propagé à d’autres parties du corps, comme les ganglions lymphatiques ou des organes plus éloignés (on parle alors de CEC métastatique).

Les carcinomes épidermoïdes cutanés sont approximativement 4 fois moins fréquents que les carcinomes basocellulaires. La majorité d’entre eux (80 à 90 %) sont localisés au niveau de la tête et du cou. Les taux augmentent avec l’âge et le sexe masculin, bien que plus récemment une forte augmentation des cas chez les femmes et les personnes de moins de 40 ans ait été observée.

Le CEC est une tumeur capable d' engendrer des métastases dans les ganglions ou dans des organes à distance. La majorité des CEC présentent un très bon pronostic, avec des taux de guérison à 5 ans supérieurs à 90 %. Le taux de métastases varie entre 2 % et 5 %, selon les études. Ce taux est plus élevé, de l'ordre de 20%, lorsque le CEC s' est développé sur une muqueuse, par exemple au niveau des lèvres ou des organes génitaux.

La présentation clinique :

Le CEC survient le plus souvent sur des zones régulièrement exposées au soleil (tête, cou, extrémités supérieures, dos des mains).  

Il se présente généralement sous la forme d'une plaque ou d'une papule de couleur chair, parfois surmontée de squames. Il peut croître, s’ulcérer et former des croûtes, avec souvent une induration perceptible à la palpation.

Certaines formes sont pigmentées, allant du brun clair au brun foncé. Les formes peu différenciées peuvent ressembler à des tumeurs rouges charnues, souvent ulcérées, ce qui rend le diagnostic différentiel avec d'autres cancers cutanés plus difficile.

Le CEC est souvent peu symptomatique. Une douleur à la pression peut parfois être présente, ou d'autres signes gênants s’il s'étend aux tissus voisins dans les formes plus avancées.

Les facteurs de mauvais pronostic :

Certains facteurs augmentent le risque que les cellules cancéreuses du CEC se propagent à d’autres parties du corps, comme un diamètre tumoral supérieur ou égal à 2 cm, ainsi que certains éléments observés au microscope après le retrait de la tumeur.  

Parmi eux, on retrouve l’épaisseur de la tumeur (indice de Breslow) dont le pronostic est moins favorable lorsqu’elle dépasse 6 mm, la présence de cellules tumorales autour des petits nerfs de la peau (engainement perinerveux), un envahissement au-delà du tissu sous-cutané, ainsi que certains sous-types histologiques (formes dites desmoplasiques, métaplasiques, acantholytiques ou adénosquameuses) où les cellules tumorales sont très différentes des cellules normales (haut niveau d’indifférenciation cellulaire).  

De plus, les personnes dont le système immunitaire est affaibli, comme les patients greffés, sont plus à risque de développer une forme grave de CEC. L’identification de ces éléments est essentielle pour adapter le traitement et le suivi des patients atteints de CEC.

info Une forme particulière : le kératoacanthome

Le kératoacanthome est une forme particulière de CEC bien différencié, présentant un comportement clinique spécifique : une croissance rapide en quelques jours à quelques semaines, mais il peut parfois régresser spontanément par la suite.  

Cliniquement, il se manifeste sous la forme d’un nodule en dôme, siégeant sur les zones photo-exposées. Il peut atteindre une taille importante sans pour autant constituer un facteur de mauvais pronostic, à condition que ses caractéristiques typiques soient bien reconnues à l’examen clinique et à l’analyse au microscope.

Le carcinome basocellulaire

Les carcinomes basocellulaires sont les cancers cutanés les plus fréquents. On estime qu' il y a environ chaque année environ 70.000 cas pour l' ensemble de la population française.

Il existe plusieurs forme de carcinomes basocellulaires : superficiel, nodulaire (le plus fréquent), le CBC infiltrant, le CBC sclérodermiforme (plus à risque de récidive) et le CBC avancé.

La présentation clinique :

Le carcinome basocellulaire superficiel se présente sous la forme d’une plaque rougeâtre ou rosée, bien délimitée et légèrement squameuse qui siège le plus fréquemment sur le tronc ou les membres. Cette forme évolue lentement.

Le carcinome basocellulaire nodulaire est la forme la plus fréquente. Il se manifeste typiquement par une petite masse ferme, ronde ou ovale, de couleur rosée ou translucide, aux bords perlés. On observe souvent à sa surface de petits vaisseaux sanguins visibles, dits arborescents en raison de leur disposition évoquant les branches d’un arbre.

Le carcinome basocellulaire infiltrant ne présente pas de signes cliniques particuliers, il ne peut être identifié qu’au microscope, après analyse de lésion.  

Une autre forme, appelée carcinome basocellulaire sclérodermiforme, est plus rare mais aussi plus agressive. Elle se présente comme une plaque ou une zone légèrement déprimée, de couleur chair ou blanchâtre, mal délimitée, parfois à l’aspect cicatriciel. Cette forme peut s’étendre en profondeur de manière insidieuse, rendant sa prise en charge plus complexe.

Enfin, certains carcinomes basocellulaires sont dits pigmentés car ils contiennent de la mélanine, ce qui leur donne une couleur brunâtre à noire.

Les facteurs de mauvais pronostic :

Le pronostic du carcinome basocellulaire dépend principalement de son risque de récidive et de sa capacité à détruire les tissus localement.

Il s’agit d’un cancer de la peau qui se propage très rarement à distance, avec un risque de métastase inférieure à 1 %.  

Le risque de récidive varie selon plusieurs facteurs, notamment la localisation de la tumeur — les zones à plus haut risque se situent sur le visage, en particulier au niveau du nez, des paupières et des oreilles —, le type de cellules tumorales observé au microscope, la présence d’une atteinte des petits nerfs à proximité de la tumeur, un affaiblissement du système immunitaire, ou encore lorsqu’il s’agit d’un carcinome récidivant après traitement.

info Toujours y penser

 La possibilité d’une tumeur de type carcinome cutané doit être évoquée devant toute lésion cutanée chronique ayant récemment augmenté de taille, s’ulcérant ou saignant légèrement. Cette lésion peut apparaître sur une peau jusque-là saine ou sur une zone présentant déjà des anomalies connues (radiodermite, ulcération, cicatrice de brûlure…). Toute lésion de ce type justifie une consultation médicale, afin de permettre un examen clinique, généralement suivi d’un prélèvement par biopsie cutanée (voir le chapitre et la vidéo sur la biopsie cutanée), qui viendra confirmer ou infirmer le diagnostic. 

Les causes

L’exposition aux rayons ultraviolets (UV) du soleil

L'exposition aux UV du soleil est un facteur de risque majeur de développement des carcinomes cutanés. Les UV du soleil sont capables de provoquer des anomalies au niveau du noyau des kératinocytes, les cellules de l'épiderme, et de leur ADN, entraînant des mutations génétiques pouvant aboutir à la cancérisation de la cellule, d’autant plus qu’avec le vieillissement, l’organisme répare moins bien ces lésions.

Les personnes ayant le plus de risque d'être atteintes par ce type de cancer ont la peau claire, les yeux et les cheveux clairs, des difficultés à bronzer et prennent facilement des coups de soleil.

Les carcinomes épidermoïdes cutanés sont plus volontiers liés à l’exposition solaire chronique et prolongée tout au long de la vie, ce qui explique leur plus grande fréquence dans un certain nombre de professions dites exposées (agriculteurs, sujets travaillant sur les routes, marins, moniteurs de sport…).

Les carcinomes basocellulaires, en revanche, se développent plus volontiers chez des sujets ayant eu des expositions solaires intermittentes, et plutôt dans l'enfance.

Vu l’importance de l’exposition solaire dans l’apparition des deux types de carcinomes cutanés, il apparaît clairement que les populations à risque sont celles à peau claire, et que la protection solaire constitue le meilleur moyen de prévention.

Les cabines de bronzage

Les études épidémiologiques, bien que discordantes, montrent une tendance à l'augmentation du risque de carcinomes cutanés chez les personnes utilisant précocement, dans la vie, et régulièrement ensuite, des cabines de bronzage. Les autorités sanitaires de très nombreux pays déconseillent très fortement l’usage de ces cabines. Pour en limiter les méfaits, un encadrement strict (formation spécifique des esthéticiennes, interdiction d’utilisation avant 18 ans, affichage des médicaments photosensibilisants dans les salles d’attente…) a été mis en place depuis quelques années..

 Un déficit immunitaire 

Les personnes dont le système immunitaire est affaibli, comme celles atteintes d’un cancer, d’une infection par le VIH, ou les personnes greffées sous traitement immunosuppresseur au long cours, sont plus à risque de développer un carcinome cutané. Elles sont également plus susceptibles de présenter une forme plus invasive. Chez ces patients, une prévention solaire renforcée et un suivi dermatologique rapproché sont nécessaires.

Des facteurs génétiques

Plusieurs maladies héréditaires augmentent le risque de survenue de carcinome cutané. Par exemple, les personnes atteintes de xéroderma pigmentosum présentent un risque accru de développer un carcinome cutané en raison de l'altération de leur capacité à réparer les dommages causés par les UV sur leur ADN, tout comme celles atteintes d'albinisme oculocutané, qui présentent une photosensibilité plus importante.

D'autres syndromes génétiques, tels que le syndrome de Gorlin (lié à une mutation du gène PTCH1), le syndrome de Bazex-Dupré-Christol (mutation du gène ACTRT1) et le syndrome de Muir-Torre, favorisent spécifiquement la survenue de carcinomes basocellulaires. Dans ces cas, les tumeurs sont généralement plus nombreuses et apparaissent plus précocement que dans la population générale.

Des facteurs chimiques et physiques. 

Les expositions environnementales à des substances telles que l’arsenic et le goudron de houille favorisent le développement des deux types de carcinomes cutanés. La radiothérapie, lorsqu’elle est administrée à faibles doses, peut provoquer l’apparition de carcinomes basocellulaires après un délai de 20 à 25 ans. En revanche, à fortes doses, elle peut entraîner des carcinomes épidermoïdes cutanés sur des zones déjà fragilisées par une radiodermite.

Le papillomavirus humain  

Le papillomavirus humain (HPV) pourrait jouer un rôle dans le développement des carcinomes épidermoïdes de la peau, principalement chez les personnes immunodéprimées. Depuis plusieurs années, on sait que certains types de HPV, appelés α-HPV (notamment les types 16, 18, 5 et 8), augmentent le risque de cancers au niveau des muqueuses anogénitales et de l’oropharynx (la gorge). Un autre groupe de HPV, les β-HPV, est fréquemment retrouvé au sein des CEC chez les personnes immunodéprimées, en particulier chez les patients ayant reçu une greffe d’organe. Leur rôle exact dans la formation de ces cancers n’est pas encore complètement compris.

Les vaccins actuels contre le HPV ciblent surtout les types α-HPV à haut risque, et on ne sait pas encore clairement s’ils protègent aussi contre les types β-HPV. De nouveaux vaccins, spécialement conçus pour cibler les β-HPV, sont en développement et pourraient à l’avenir aider à prévenir ce type de cancer de la peau.

Certains médicaments

Certains médicaments augmentent le risque de développer un carcinome cutané. Par exemple, les inhibiteurs de BRAF utilisés dans la prise en charge du mélanome augmentent le risque de CEC lorsqu’ils sont pris en monothérapie. C’est aussi le cas de certains immunosuppresseurs.  

Le tabac

Le tabac est un facteur important favorisant l'apparition de carcinomes épidermoïdes cutanés de la lèvre. Son rôle dans les autres types de carcinomes cutanés n’est pas connu.

Certaines maladies de peau chroniques

Plusieurs maladies de peau chroniques, ainsi que les plaies cutanées persistantes comme les ulcères de jambe ou les cicatrices de brûlure, peuvent constituer un terrain favorable au développement de carcinomes épidermoïdes cutanés.

Quels examens  

La dermoscopie 

Le diagnostic de carcinome cutané repose sur un examen clinique approfondi, aidé de la dermoscopie (une sorte de loupe médicale) qui permet de poser le diagnostic de carcinome, et parfois d’orienter vers son sous-type histologique. Le diagnostic sera ensuite confirmé par l’analyse de la tumeur au microscope.

D’autres techniques non invasives, comme la microscopie confocale à réflexion in vivo (RCM) et la tomographie par cohérence optique (OCT), peuvent être utilisées dans certains cas, mais ne sont pas recommandées ni disponibles en routine à ce jour.

La biopsie

Un prélèvement de la lésion, appelé biopsie, est envoyé à un laboratoire spécialisé. Là, il est préparé puis examiné au microscope pour déterminer précisément le type de tumeur : un carcinome basocellulaire ou un carcinome épidermoïde de la peau.

Il existe en effet plusieurs types de carcinomes basocellulaires et épidermoïdes cutanés, pour lesquels le traitement ne sera pas nécessairement le même. En général, le délai entre la réalisation de la biopsie et l’obtention des résultats est de l’ordre de quelques jours à quelques semaines.

Dans le cas d’une lésion de petite taille, la biopsie peut permettre d’enlever entièrement la lésion ainsi qu’une marge suffisante de peau saine autour. Le prélèvement permet alors à la fois de confirmer le diagnostic et de traiter la lésion.

Le bilan d' extension

En cas de carcinome basocellulaire, il n’y a pas de bilan particulier à prévoir, dans la mesure où ce type de carcinome a une évolution purement locorégionale. Il convient donc seulement d’évaluer au mieux l’extension de la lésion, en surface et en profondeur, afin d’apprécier l’importance de l’acte chirurgical à réaliser. Seules les formes avancées nécessiteront une imagerie par IRM pour préciser l’extension de la lésion

En cas de carcinome épidermoïde cutané, il est nécessaire d’analyser les ganglions lymphatiques de drainage. Le médecin recherche donc une éventuelle atteinte de ces ganglions en pratiquant un examen clinique approfondi, éventuellement complété par une échographie. Le recours à d’autres examens ne se justifie que s’il existe une suspicion clinique d’atteinte d’un organe à distance ou la encore une IRM dans les formes avancées. 

Les traitements

La prévention

Une exposition excessive aux UV, qu’elle soit chronique ou occasionnelle, d’origine professionnelle ou liée aux loisirs, pendant l’enfance ou à l’âge adulte, est associée à une augmentation du risque de carcinomes cutanés. Il est donc recommandé, en particulier pour les personnes à risque, d’éviter de s’exposer au soleil entre 10 h et 16 h, de porter un chapeau couvrant bien la nuque et les oreilles, et d’appliquer une crème solaire protégeant efficacement contre les UVA et les UVB. L’utilisation des cabines de bronzage est fortement déconseillée.

La chirurgie d’exérèse du carcinome cutané

Il est reconnu par l’ensemble des médecins spécialisés dans la prise en charge des cancers cutanés que le traitement standard des carcinomes basocellulaires et épidermoïdes cutanés est avant tout chirurgical. Les autres modalités de traitement sont réservées à des formes ou des terrains particuliers. Pour la majorité des carcinomes, la chirurgie est efficace pour traiter la tumeur, avec un retentissement esthétique et fonctionnel généralement très faible.

La chirurgie des carcinomes suit des règles précises :  

L’une des plus importantes consiste à pratiquer une exérèse qui dépasse le périmètre visible de la lésion. En retirant également une zone de tissu sain autour de la tumeur, à la fois en surface et en profondeur — ce que l’on appelle la marge d’exérèse —, le chirurgien réduit le risque de récidive à partir de cellules anormales éventuellement présentes en périphérie de la lésion.

Pour les carcinomes basocellulaires, cette marge d’exérèse varie de 3 à 10 mm, selon la localisation, le type clinique et les caractéristiques observées au microscope. Pour les carcinomes épidermoïdes cutanés, la marge minimale est de 5 mm, mais elle est souvent portée à 10 mm ou plus.

L’intervention est réalisée par un médecin expérimenté dans le traitement des cancers de la peau et en chirurgie cutanée, le plus souvent un dermatologue ou un chirurgien plasticien.

Conjuguer de bons résultats carcinologiques et esthétiques :

En fonction de la taille de la tumeur, de sa localisation et de la marge d'exérèse requise, la taille de la zone de peau à retirer peut varier considérablement. Ce sont donc ces trois éléments qui détermineront le type d'intervention.

Chaque fois que cela est possible sur le plan fonctionnel et esthétique, la zone d'exérèse bénéficie d'une simple suture, ce qui permet d'obtenir des cicatrices moins visibles. Dans ce cas, la guérison se fait en une semaine à dix jours.

Si la suture simple n'est pas possible, plusieurs options sont envisageables. On peut laisser la cicatrisation se faire naturellement avec l'aide de pansements gras cicatrisants "interface", ce qui permet souvent d'obtenir une cicatrice de bonne qualité, mais cela nécessite un délai de deux à deux mois et demi. Une autre possibilité est de recouvrir la zone opérée par un morceau de peau prélevé dans une zone voisine (technique des lambeaux cutanés), ou encore d'avoir recours à une greffe de peau prélevée sur le patient, avec des délais de cicatrisation d'environ trois semaines pour les lambeaux et deux mois pour les greffes.

Un suivi clinique rapproché :

Une fois la lésion retirée, le patient doit être suivi régulièrement pour repérer une éventuelle récidive (tous les 6 mois la première année, puis sur une base annuelle) ou l’apparition d’une nouvelle lésion. Il est important de savoir que si une personne a déjà eu un carcinome cutané, elle présente un risque accru de développer un autre carcinome.

Une intervention en un ou deux temps :

Dans les cas les plus simples et pour les lésions de petite taille, généralement jusqu’à 5 mm, le traitement se fait en un seul temps, la biopsie étant réalisée en même temps que l’acte chirurgical d’exérèse. Pour les lésions plus évoluées ou situées dans des zones où il est esthétiquement ou fonctionnellement difficile de procéder à une intervention large, l’acte chirurgical intervient en général après une biopsie initiale de petite taille.

Dans les cas où l’épargne de la peau est importante fonctionnellement ou esthétiquement, l’acte chirurgical se fait souvent en passant au plus près de la tumeur. Il arrive que l’examen histologique de la pièce opératoire indique une marge d’exérèse insuffisante pour garantir un acte curatif, ce qui impose une réintervention chirurgicale.  

Il est possible de contourner cette difficulté de deux façons :

  1. En prévoyant d’emblée une chirurgie en deux temps, c’est-à-dire ablation de la lésion avec les marges d’exérèse qui semblent appropriées, puis attente des résultats de l’examen histologique avant de refermer la zone d’intervention ou, si nécessaire, d’enlever un supplément de peau pour arriver en zone saine. En attendant le résultat de l’analyse histologique, un pansement gras est appliqué sur la zone opérée pour éviter l’infection et faciliter la cicatrisation ultérieure.
  2. En ayant recours à une technique chirurgicale dite de Mohs (du nom du chirurgien qui l’a développée), au cours de laquelle les bords de la zone enlevée sont examinés au microscope « en temps réel ». Ceci permet au chirurgien de compléter progressivement son geste jusqu’à ce qu’il soit sûr d’être en zone saine de tous les côtés de l’exérèse. Cette chirurgie, techniquement plus lourde, est peu développée en Europe du fait d’indications limitées. Elle est cependant plus pratiquée aux États-Unis.

Compte tenu du degré élevé de sophistication de ces deux alternatives, elles sont en pratique réservées aux lésions qui ont un risque élevé de récidive en cas d’exérèse incomplète.

Les autres possibilités thérapeutiques pour les formes superficielles

Les traitements chimiques :

Pour les tumeurs superficielles (carcinomes basocellulaires superficiels, kératoses solaires ou actiniques, maladie de Bowen ou carcinomes épidermoïdes cutanés in situ), il existe également deux types de traitements chimiques : l'imiquimod et le 5-fluorouracil.

La photothérapie dynamique :

Il existe aussi une méthode de traitement combinant agents chimiques et physiques, intitulée photothérapie dynamique. Cette méthode consiste à appliquer une crème photosensibilisante sur la lésion, puis à irradier celle-ci avec une source lumineuse appropriée quelques heures après l'application. Cela permet la destruction des cellules cancéreuses. Les résultats sont très bons sur les carcinomes superficiels.

D'une façon générale, les traitements chimiques et la photothérapie dynamique sont surtout indiqués chez les sujets présentant des carcinomes superficiels à répétition. Ces traitements constituent des alternatives à des actes chirurgicaux répétitifs, mais nécessitent une surveillance très stricte des patients traités, car le risque de récidive est plus important qu'avec la chirurgie.

La cryothérapie :

La cryothérapie peut également être proposée pour les carcinomes basocellulaires superficiels. Elle a l'avantage de pouvoir être réalisée en consultation. Dans 80 % des cas, elle est efficace mais peut laisser une cicatrice dépigmentée.

Traitement des formes avancées ou métastatiques

La radiothérapie :  

Si l'ablation chirurgicale de la tumeur n'est pas possible pour des raisons techniques ou si elle est contre-indiquée, il est possible d'avoir recours à la radiothérapie du carcinome, qui donne cependant de moins bons résultats à la fois sur le plan du contrôle du cancer et sur le plan esthétique. Cette technique est employée essentiellement chez les sujets très âgés inopérables et en cas de tumeurs trop volumineuses pour être opérées sans séquelles majeures.  

Elle est également indiquée en cas d’infiltration péri nerveuse de la tumeur.

La radiothérapie des ganglions lymphatiques peut être envisagée lorsque plusieurs ganglions sont touchés par le cancer, ou si la tumeur a endommagé ces ganglions (on parle dans ce cas d’effraction capsulaire).

Les thérapies ciblées : 
Depuis quelques années, des thérapies ciblées sont développées pour traiter les formes avancées ou métastatiques de carcinomes cutanés. Ces traitements ciblent spécifiquement les anomalies moléculaires responsables de la tumeur, ce qui permet d’être plus efficace et mieux toléré que les chimiothérapies classiques.

  • Dans le cas des carcinomes épidermoïdes cutanés, la voie de l'EGFR (récepteur du facteur de croissance épidermique) est généralement ciblée. Des inhibiteurs spécifiques, tels que le cetuximab et le gefitinib, sont utilisés pour bloquer ce récepteur. Selon plusieurs études, l'association du cetuximab à une polychimiothérapie pourrait améliorer la survie sans progression de la maladie, comparativement à l'utilisation du cetuximab seul.
  • Dans le cas des carcinomes basocellulaires : Les inhibiteurs de la voie Hedgehog, comme le vismodegib et le sonidegib, sont des traitements ciblés développés pour certains carcinomes basocellulaires avancés. Ces molécules agissent en bloquant une voie de signalisation anormalement activée dans la majorité des CBC, la voie Hedgehog, impliquée dans la croissance incontrôlée des cellules tumorales. Le vismodegib (Erivedge®) et le sonidegib (Odomzo®) ciblent spécifiquement la protéine SMO (Smoothened), un acteur clé de cette voie. En France, ces traitements sont autorisés pour les CBC localement avancés non opérables ou non accessibles à une radiothérapie, ainsi que pour les formes métastatiques. Les études cliniques ont montré une efficacité notable : environ 60 % de réponse objective pour le vismodegib dans les formes localement avancées, et des résultats comparables pour le sonidegib. Ces médicaments permettent souvent une réduction significative de la taille des tumeurs, voire une disparition complète dans certains cas. Cependant, ils peuvent entraîner des effets secondaires (crampes musculaires, perte de goût, fatigue, perte des cheveux) qui nécessitent une surveillance attentive.

L’immunothérapie :

  • Dans le cas des carcinomes épidermoïdes cutanés :

L’immunothérapie, en particulier avec les anti PD1 tels que le cemiplimab et le pembrolizumab, a récemment remplacé la chimiothérapie dans le traitement des carcinomes épidermoïdes cutanés localement avancées ou métastatiques.

Des études sont également en cours pour déterminer l’efficacité de ces traitements avant ou après la chirurgie.  

Les anti-PD1 semblent offrir des réponses durables chez environ la moitié des patients traités pour un CEC inopérable, qu’il soit localement avancé ou métastatique.  

Le cemiplimab est indiqué pour les CEC avancés, qui ne peuvent être guéris par chirurgie ou radiothérapie et qui ne peuvent pas être traités par chimiothérapie, en raison d’un échec ou d’une contre-indication.  

De son côté, le pembrolizumab est utilisé en première ligne dans les carcinomes épidermoïdes cutanés de la tête et du cou métastatiques ou en rechute inopérable (tumeurs exprimant le PDL1 avec un score combiné positif CPS supérieur ou égal à 1).

  • Dans le cas des carcinomes basocellulaires :  

Des recherches sont également en cours pour explorer l’utilisation de l’immunothérapie dans le traitement des carcinomes basocellulaires.

La chimiothérapie :

La chimiothérapie n’est plus utilisée en première intention pour les carcinomes épidermoïdes cutanés avancés. Elle peut toutefois être envisagée dans les formes localement avancées ou métastatiques, notamment si la chirurgie ou l’immunothérapie sont impossibles ou inefficaces. Elle est parfois utilisée en amont d’une chirurgie (traitement néoadjuvant) pour réduire la taille de la tumeur, ou en association avec la radiothérapie (radiochimiothérapie) dans les formes inopérables. 

info Conseils

Les promesses n' engagent que ceux qui les écoutent.

À ce jour, aucun moyen médicamenteux ou nutritionnel permettant de bronzer sans risque n’a fait la preuve de son efficacité dans la prévention des cancers cutanés.

Les pilules de bronzage à base de carotène donnent certes un teint hâlé, mais elles n’empêchent pas les coups de soleil. De plus, rien ne prouve qu’un apport accru en bêta-carotène réduise le risque de cancers cutanés.

Seule une exposition raisonnée et modérée aux rayons UV solaires, associée à une protection efficace, permet de réduire le risque de carcinomes cutanés.

 

Surveiller sa peau de près

Face à une lésion cutanée chronique qui évolue, s’ulcère ou saigne, il est essentiel de consulter rapidement un médecin afin de permettre un diagnostic précoce et, par conséquent, un traitement simple et efficace.

info Télécharger la fiche

Obtenir la fiche info