I. Le psoriasis, qu’est-ce que c’est ? Comprendre
1. Un renouvellement cutané accéléré
Le psoriasis est lié à une inflammation chronique de la peau. Il survient chez des personnes génétiquement prédisposées, en général à la faveur d' un facteur physique ou psychologique favorisant.
Le psoriasis est une maladie fréquente puisqu' elle touche environ 2% de la population française, et ceci à tous les âges de la vie. S' il s' agit la plupart du temps d' une maladie bénigne, le psoriasis peut constituer un handicap difficile à vivre au quotidien et avoir un retentissement psychologique important.
Le psoriasis est dû à une inflammation chronique de la peau, dont on connaît de mieux en mieux l' origine précise. Cette inflammation, attestée par la présence dans la peau de cellules sanguines du système immunitaire, les lymphocytes, entraîne un emballement de la prolifération des cellules de l' épiderme, les kératinocytes.
Au lieu de se renouveler en 21 jours, les kératinocytes se renouvellent en 7 jours. Ce renouvellement accéléré de l' épiderme s' accompagne d' une anomalie des cellules qui n' ont pas le temps de bien finaliser leur maturation normale.
2. Des formes de sévérité très variable
Les formes classiques
Le psoriasis en plaques
La lésion typique est une plaque érythémato-squameuse, c'est-à-dire une plaque rouge, bien limitée, arrondie ou ovalaire, recouverte de morceaux de peau blanchâtre qui se détachent. La partie de peau qui se détache (squames) peut être très épaisse. Lorsqu'on gratte ou que l'on décape par des traitements cette partie superficielle, subsiste une rougeur de la peau.
La taille des lésions est variable allant de simples lésions arrondies de petite taille - psoriasis en gouttes - à de véritables plaques étendues - psoriasis en plaques -. Le nombre de ces lésions est également variable. Elles sont habituellement nombreuses dans le psoriasis en gouttes, alors que dans le psoriasis en plaques, il peut y avoir une plaque isolée ou au contraire de multiples lésions.
Les zones les plus fréquemment atteintes sont les zones exposées aux frottements : coudes et bord externe de l'avant-bras, genoux, région lombo-sacrée (bas du dos), cuir chevelu et ongles.
Le psoriasis du cuir chevelu
Le cuir chevelu peut être la seule localisation du psoriasis chez certaines personnes. A l'image de ce que l'on observe sur la peau, les lésions peuvent être bien délimitées, arrondies ou ovalaires, couvertes de petits lambeaux de peau qui desquament (pèlent). Elles siègent surtout sur la bordure frontale, la nuque, derrière les oreilles, formant comme un « bandeau ». Elles peuvent aussi recouvrir la totalité du cuir chevelu et former une véritable carapace : on parle alors de casque psoriasique. Les cheveux sont englués dans les plaques et peuvent parfois tomber ou se casser avec les squames de manière transitoire, surtout en cas de grattage qui est fréquent dans cette localisation.
Le psoriasis des ongles ou psoriasis unguéal
Les ongles, qui sont parfois touchés au cours d'un psoriasis, peuvent n'être que la seule localisation de la maladie chez certaines personnes. Ils peuvent présenter de légères déformations punctiformes à l'image d'un « dé à coudre », s’ épaissir, se déformer ou se décoller du doigt. Sous l'ongle qui peut perdre de sa transparence, la peau peut être très épaissie (hyperkératose sous-unguéale).
Les formes plus rares
Le psoriasis inversé ou psoriasis des plis
Dans cette forme de psoriasis, la localisation des lésions ne concerne pas les zones de frottement en relief, mais prédomine dans les plis (zones inversées) comme le pli inter-fessier, les plis inguinaux (racine des cuisses), les creux axillaires (sous les bras), les plis sous-mammaires (sous le sein) ainsi que l'ombilic. Les lésions sont ici plus inflammatoires que squameuses. Cette forme est trompeuse, parfois prise à tort pour une mycose.
Le psoriasis des muqueuses
Le psoriasis peut toucher les muqueuses.
Dans la bouche, il donne un aspect de langue « géographique » avec des zones un peu épaissies blanchâtres indolores. Les régions génitales peuvent être le siège de plaques rouges ne desquamant pas. Les lésions peuvent être à l’origine de démangeaisons, de brûlures, de douleurs lors des rapports sexuels ou au contraire être indolores. Elles sont souvent à l’origine d’une altération de la qualité de vie.
Le psoriasis palmo-plantaire
La localisation des lésions aux paumes et aux plantes n'est pas rare dans le psoriasis Il s'agit donc d'une forme particulière de psoriasis dite “psoriasis palmo-plantaire”. La peau épaissie perd de sa souplesse et elle se fissure. Ces fissures sont douloureuses, elles peuvent saignoter et elles sont surtout très invalidantes, gênant le patient dans sa vie quotidienne (cuisine, chaussage, marche…), dans sa vie sociale (impossibilité de serrer la main) et professionnelle conduisant parfois à un arrêt de travail.
Le psoriasis du visage
C’ est une localisation plus fréquente chez l’enfant que chez l’ adulte. Elle est associée généralement à un psoriasis débutant tôt dans la vie, sévère et évoluant depuis de nombreuses années. Une atteinte du cuir chevelu est souvent présente aussi. Si le psoriasis du visage n’ est pas une atteinte trop fréquente, il affecte particulièrement les patients atteints par son impact social et esthétique. Il se manifeste par des plaques rouges ou rosées du centre du visage et/ou de sa périphérie plus ou moins squameuses.
Le psoriasis au cours de l' infection par le VIH
Le psoriasis au cours de l' infection par le VIH est souvent plus grave et réfractaire aux traitements conventionnels, mais répond bien aux traitements de l' infection virale elle-même.
Le psoriasis de l' enfant
L' enfant peut être touché assez précocement, au cours de ses premières années de vie. On peut voir des psoriasis en gouttes au décours d' une angine à streptocoques. Les psoriasis en plaques ne sont pas exceptionnels.
Les formes graves
Le psoriasis peut prendre de très nombreuses formes. Si certains patients ne souffrent que de lésions discrètes disparaissant spontanément, d'autres présentent des formes très étendues et handicapantes. La plupart des psoriasis ont une évolution bénigne, mais 20% des cas sont considérés comme des formes modérées à sévères. Les patients infectés par le VIH présentent des formes particulièrement sévères de psoriasis. Cependant, dans la plupart des cas, on ne sait pas aujourd'hui pourquoi certains malades vont présenter une forme minime et d'autres une forme très sévère.
Les formes sévères de psoriasis sont définies par :
- Une grande surface cutanée atteinte et/ou
- Un retentissement important sur la qualité de vie lorsqu' elles constituent par exemple un handicap pour la vie quotidienne,
- Une spécificité clinique : psoriasis érythrodermique (peau entièrement rouge de la tête aux pieds), psoriasis pustuleux (les plaques rouges sont recouvertes de pustules), rhumatisme psoriasique, psoriasis au cours de l'infection par le VIH.
Elles sont souvent associées à d' autres maladies comme le diabète dit de type 2 (ou non dépendant de l' insuline), l' obésité ainsi qu' une élévation des graisses dans le sang (les lipides sanguins), en particulier le cholestérol et les triglycérides. Un état dépressif ou une dépression survient en outre dans 30 à 40% des psoriasis sévères.
Le psoriasis érythrodermique
Il s' agit d' un psoriasis généralisé atteignant plus de 90% de la peau. Il existe une desquamation abondante et la peau peut être mise à nu, donc être toute rouge (érythrodermie). Il s' agit d' une forme grave de psoriasis car elle peut se compliquer de surinfections, de dérèglement de la température corporelle et d' anomalies de l' équilibre ionique (anomalies hydro-électrolytiques). Une hospitalisation est nécessaire pour sa prise en charge.
Le psoriasis pustuleux
Cette forme très particulière et rare de psoriasis se caractérise par des pustules jaunâtres localisées au niveau de la paume des mains ou de la plante des pieds, ou généralisées à l' ensemble du corps. Il survient soit d' emblée, soit sur un psoriasis déjà connu. Dans les formes localisées aux mains et aux pieds, il existe un handicap fonctionnel souvent important, avec des difficultés à la marche et aux travaux manuels. Dans les formes généralisées, l' état général est altéré avec de la fièvre et souvent des atteintes articulaires. L' évolution est parfois grave, pouvant menacer le pronostic vital.
3. Le psoriasis articulaire
Dans 20% des cas de psoriasis, il existe une atteinte articulaire associée appelée rhumatisme psoriasique ou arthrite psoriasique. Elle peut être responsable de douleurs articulaires qui réveillent la nuit avec une raideur matinale prolongée (supérieure à 30 minutes), mais parfois aussi de déformations liées à des destructions articulaires irréversibles si elle n'est pas traitée précocement.
L'atteinte articulaire peut être isolée (monoarthrite), ne concerner que quelques articulations (oligoarthrite) ou au contraire, beaucoup d'articulations (polyarthrite). Il touche en particulier les articulations inter-phalangiennes distales (extrémités des doigts et des orteils), caractéristique qui le distingue de la polyarthrite rhumatoïde. La colonne vertébrale peut également être atteinte (spondylarthrite), de même que les articulations sacro-iliaques.
Les autres manifestations possibles incluent :
- Enthésites (inflammations des insertions tendineuses), notamment au talon d'Achille ou sous la plante des pieds
- Dactylite ou "doigt en saucisse" (gonflement complet d'un doigt ou d'un orteil)
- L'atteinte des ongles (psoriasis unguéal) est souvent associée et constitue un facteur de risque d'arthrite psoriasique
Le diagnostic précoce et la prise en charge par un rhumatologue sont essentiels pour prévenir les dommages articulaires irréversibles. Des traitements efficaces existent, notamment les biothérapies qui permettent de contrôler à la fois les manifestations cutanées et articulaires.
4. Psoriasis, comorbidités et inflammation systémique
Le psoriasis n'est pas qu'une simple maladie de peau : c'est une maladie inflammatoire chronique qui peut toucher l'ensemble de l'organisme. Cette inflammation généralisée, appelée inflammation systémique, explique pourquoi les personnes atteintes de psoriasis ont un risque accru de développer d'autres problèmes de santé.
Les maladies cardiovasculaires sont plus fréquentes chez les patients psoriasiques. L'inflammation chronique favorise l'athérosclérose (dépôt de graisses dans les artères), augmentant le risque d'infarctus du myocarde et d'accident vasculaire cérébral, particulièrement en cas de psoriasis sévère ou étendu.
Le syndrome métabolique est également surreprésenté, associant obésité abdominale, diabète de type 2, hypertension artérielle et anomalies du cholestérol. Cette association bidirectionnelle signifie que le psoriasis favorise ces troubles métaboliques, mais que l'obésité et le diabète peuvent aussi aggraver le psoriasis, créant un cercle vicieux.
D'autres affections sont plus fréquentes : maladies inflammatoires chroniques de l'intestin (maladie de Crohn, rectocolite hémorragique), stéatose hépatique (foie gras), troubles anxio-dépressifs, et certaines maladies auto-immunes.
C'est pour ces raisons qu'un suivi régulier avec dépistage des facteurs de risque cardiovasculaire (pression artérielle, glycémie, bilan lipidique) est recommandé. L'adoption d'une hygiène de vie saine (alimentation équilibrée, activité physique régulière, arrêt du tabac, limitation de l’alcool) est primordiale pour le contrôle optimal du psoriasis. Ces mesures permettent non seulement d’améliorer la santé générale, mais aussi de renforcer l’efficacité des traitements spécifiques du psoriasis.