Qu’est-ce que le lymphome cutané ?
Fiche patient GFELC : Comprendre les lymphomes cutanés
Un lymphome est un cancer d’un type de globules blancs, appelés lymphocytes.
On parle de lymphome « primitif cutané » lorsque les lymphocytes anormaux naissent et prolifèrent au sein de la peau et que l’on ne met pas en évidence d’atteinte des ganglions ou d’organe interne au moment du diagnostic.
Ils sont plus rares que les autres cancers de la peau tels que les carcinomes ou les mélanomes, et il en existe plusieurs types. Le nombre de nouveaux cas annuel est d’environ 800 (autour de 1,5/100.000 hab./an).
Il faut les différencier des lymphomes développés à partir des ganglions, qui sont beaucoup plus fréquents, car leur évolution et leur traitement sont différents. Alors que les lymphomes ganglionnaires sont pris en charge dans des services d’hématologie, médecine interne ou oncologie, les lymphomes cutanés sont pris en charge par les dermatologues, parfois en cabinet libéral pour des formes débutantes ou à l’hôpital dans un service de Dermatologie.
Si on a fait, ces dernières années, beaucoup de progrès dans le diagnostic des différents types de lymphomes cutanés et dans leur traitement, leur origine n’est pas clairement identifiée, même si pour certains d’entre eux l’exposition à des toxiques (solvants ou pesticides) est suspectée. Ils ne sont en tous les cas pas liés à l’exposition solaire, contrairement aux autres cancers de la peau. Il ne s’agit pas d’une maladie contagieuse et elle n’est pas transmissible à la descendance.
Un réseau spécialisé pour les lymphomes cutanés
En France, il existe un réseau, labellisé par l’INCA (Institut national du cancer), qui est spécialisé dans les lymphomes cutanés, appelé « Groupe Français d’Étude des lymphomes cutanés », qui est aussi un groupe de la Société Française de Dermatologie regroupant des centres experts pour les lymphomes cutanés.
Ce groupe pluridisciplinaire mène des travaux pour mieux traiter et comprendre les lymphomes cutanés et se réunit tous les deux mois pour discuter en réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) nationale de recours, des dossiers difficiles et proposer des solutions thérapeutiques, y compris l’inclusion dans des essais thérapeutiques pour l’accès à des thérapies innovantes. Certains membres du GFELC font partie d’équipes INSERM travaillant sur les lymphomes cutanés.
- Pour en savoir sur le GFELC : gfelc.org
- Le fond de dotation pour la recherche clinique de la SFD : projets de recherche
Comment fait-on le diagnostic ?
Les lymphomes cutanés se révèlent par des manifestations sur la peau qui sont différentes selon le type de lymphome.
On distingue deux grandes catégories :
1. Les lymphomes cutanés primitifs à cellules T (LCP T)
Ils sont les plus fréquents. Sous ce terme on trouve plusieurs maladies différentes :
Le lymphome cutané le plus fréquent s’appelle le mycosis fongoïde. Il est développé à partir de lymphocytes T qui se multiplient dans les couches superficielles de la peau. Il survient plus souvent chez l’adulte autour de 50 ans et se manifeste par des plaques rouges souvent arrondies, dites « annulaires », qui démangent et sont situées au début sur les zones cachées de la lumière (les fesses, les faces internes des bras ou des cuisses).
Au début, les plaques peuvent disparaître toutes seules ou avec l’exposition au soleil, mais ensuite, elles persistent et peuvent s’étendre.
Des formes particulières dites « pilotropes » existent, elles sont liées à l’infiltration de la paroi des follicules pileux par les lymphocytes tumoraux. La présentation est alors un peu différente, avec des zones d’alopécie, des zones avec un aspect granuleux en regard des follicules pileux ou encore des kystes ou des points noirs ressemblant à une acné.
L’évolution de ce lymphome est en général lente sur plusieurs dizaines d’années. Les patients ayant des plaques très limitées ont une survie identique à la population générale (en savoir plus sur le mycosis fongoïde au stade limité : fiche patient du GFELC).
Chez certains patients, l’évolution peut être plus agressive avec l’apparition de tumeurs ou encore sous forme d’une rougeur de l’ensemble du corps que l’on appelle une érythrodermie et qui est souvent à l’origine de démangeaisons très importantes. Dans ces cas-là, il peut y avoir des ganglions, des lymphocytes anormaux dans le sang et le pronostic vital est alors engagé (en savoir plus sur le mycosis fongoïde au stade étendu : fiche patient du GFELC).
Il existe également des formes de mycosis fongoïde de l’enfant, généralement plus superficielles et de meilleur pronostic que chez l’adulte (en savoir plus sur le mycosis fongoïde de l’enfant : lien vers fiche patient du GFELC).
- La forme érythrodermique avec des lymphocytes anormaux dans le sang est appelée syndrome de Sézary
D’autres lymphomes primitivement cutanés plus rares existent, qui peuvent se révéler le plus souvent sous la forme de nodules ou de tumeurs rosées à violacées, uniques ou multiples, dont la surface peut être soit lisse, soit ulcérée. Certaines formes peuvent régresser spontanément en partie ou complètement.
Il est très important d’avoir un diagnostic précis et de bien les typer, car leur pronostic est variable, allant de formes très « indolentes » d’excellent pronostic (les plus fréquentes) à des formes plus agressives rares.
Autres lymphomes T cutanés
- Papuloses lymphomatoide
- Lymphome T cutané à grandes cellules CD30+
- Lymphoprolifération T CD4+ à petites et moyennes cellules
- Lymphome T sous-cutané
Lymphomes B cutanés :
Confirmation du diagnostic : déterminer le type de lymphome
Le premier examen à réaliser est une biopsie de peau, qui consiste à prélever un fragment de la peau atteinte sous anesthésie locale. Ce geste peut être réalisé par le dermatologue en ville.
La biopsie est envoyée au laboratoire, qui analyse le type de lymphocytes qui prolifèrent et précise ainsi le type de lymphome. C’est une étape essentielle, car elle conditionne la prise en charge. Parfois, la biopsie nécessite des analyses plus poussées. Elle est alors envoyée à un laboratoire de référence membre du réseau du GFELC. Il peut parfois être nécessaire de refaire la biopsie pour la prélever et l’envoyer au laboratoire dans des conditions particulières. Cela est fait à l’hôpital avec un dermatologue référent pour les lymphomes cutanés.
Le diagnostic est ensuite validé au cours d’une réunion de concertation pluridisciplinaire (RCP) spécialisée pour les lymphomes cutanés dans le centre régional membre du GFELC. Le dossier est revu avec l’ensemble des résultats et un traitement sera proposé.
Des analyses sanguines sont parfois nécessaires selon le type de lymphome.
Déterminer le stade du lymphome
Une fois le type de lymphome établi, il faut :
- Évaluer le stade cutané selon le type, l’étendue ou le nombre de lésions.
- Vérifier l’absence d’atteinte en dehors de la peau. Ce bilan doit être négatif pour confirmer qu’il s’agit bien d’un lymphome primitivement développé à partir de la peau. Le bilan est adapté au type de lymphome et à l’extension des lésions. Ainsi, pour un mycosis fongoïde avec très peu de plaques, seul l’examen clinique vérifiant l’absence de ganglion et une prise de sang simple sont nécessaires. Dans d’autres cas, on réalise en plus un scanner voire un TEP scanner du thorax, de l’abdomen et du pelvis ou des examens sanguins plus poussés, notamment pour rechercher des cellules dans le sang.
Comment traiter ?
De nombreux traitements sont possibles et des recommandations existent, adaptées au type et au stade du lymphome cutané.
1. Dans le mycosis fongoïde avec des lésions en plaques, on utilise prioritairement des traitements locaux réalisés au domicile, allant de corticoïdes en crème à des applications d'une chimiothérapie locale, le gel de chlorméthine (Ledaga®). Appliqué sur la peau, il agit directement sur les cellules tumorales cutanées avec un effet progressif. L’effet indésirable le plus fréquent est une irritation locale (rougeur, brûlure), ne nécessitant généralement qu’un espacement des applications ou l’association d’un dermocorticoïde.
Un traitement par ultraviolets (photothérapie) peut aussi être proposé. Il sera réalisé dans le cabinet d’un dermatologue ou dans le centre hospitalier pendant, en général, 3 à 4 mois. Des récidives ne sont pas exceptionnelles et elles sont alors traitées comme initialement, cela n’étant pas un signe d’une agressivité plus importante de la maladie. Le suivi à ce stade est essentiellement clinique.
À noter qu’à ce stade il n’y a pas de nécessité de faire une demande de prise en charge en affection de longue durée.
2. Dans des formes résistantes ou plus évoluées, des traitements immunomodulateurs peuvent être indiqués, tels que l’interféron alpha, le méthotrexate ou le bexarotène.
L’immunothérapie ciblée par utilisation d’anticorps monoclonaux s’est développée ces dernières années. Le brentuximab vedotin est un anticorps monoclonal conjugué, dirigé contre une protéine appelée CD30, exprimée à la surface de certaines cellules tumorales. Le mogamulizumab est, quant à lui, un anticorps monoclonal dirigé contre CCR4, un récepteur présent sur de nombreuses cellules tumorales dans les mycosis fongoïdes avancés ou le syndrome de Sézary.
La radiothérapie et, plus rarement, la chimiothérapie sont parfois prescrites.
Il peut aussi parfois se discuter, chez des patients jeunes ayant une forme agressive de mycosis fongoïde ou de syndrome de Sézary de réaliser une greffe de cellules souches qui est à ce jour le seul traitement pouvant permettre une guérison de la maladie.
L’inclusion dans un essai clinique peut aussi être proposée, permettant l’accès à de nouvelles molécules non encore commercialisées.
Certains centres de référence disposent également de techniques spécialisées, comme la photochimiothérapie extracorporelle, qui consiste à prélever une partie du sang du patient, à isoler les globules blancs, à les exposer à un médicament photosensibilisant puis à des UV avant de les réinjecter. Ils peuvent aussi proposer l’électronthérapie superficielle totale, qui consiste à réaliser une radiothérapie superficielle sur l’ensemble de la peau en 9 à 12 séances en moyennes.
Ces techniques s’adressent à des formes étendues de mycosis fongoïde. Ce choix thérapeutique se fait sur proposition de la RCP régionale Lymphomes cutanés du centre régional de référence du réseau du GFELC.
3. Pour les autres types de lymphomes, les traitements sont très variables.
Il existe beaucoup de lymphomes de très bon pronostic se présentant sous la forme de nodule ou de tumeur unique, qui sont traités par radiothérapie localisée seule. D’autres peuvent nécessiter des perfusions d’anticorps monoclonaux ou encore une chimiothérapie.
Suivi
Le suivi des lymphomes cutanés est surtout clinique.
- Pour le mycosis fongoïde en plaques, un suivi alterné entre le dermatologue de ville et le dermatologue hospitalier référent est souvent mis en place, en sachant que le traitement doit souvent être prolongé. Il peut être parfois arrêté, mais les récidives sont fréquentes et nécessitent de reprendre le traitement plusieurs mois, ou même de garder un traitement d’entretien en continu.
- Pour des lymphomes sous forme de nodules traités par radiothérapie, le suivi est réalisé principalement par le dermatologue de ville, surtout les 2 à 3 premières années, en sachant que dans la majorité des cas, la guérison est obtenue avec ce traitement.
- Pour les lymphomes plus évolués ou plus agressifs, le suivi est réalisé exclusivement à l’hôpital, car il est souvent nécessaire d’adapter le traitement.
Ne pas rester seul face à un diagnostic de lymphome cutané
L’association de patients ELLYE (Ex-France Lymphome Espoir) accompagne les personnes atteintes de lymphomes, y compris les lymphomes cutanés, ainsi que leurs proches. Elle propose des informations fiables, des groupes de parole, un soutien psychologique et met en relation les patients avec des bénévoles formés qui ont eux-mêmes traversé la maladie. ELLYE participe également à la sensibilisation du public, au financement de projets de recherche et au dialogue avec les professionnels de santé pour améliorer la prise en charge et la qualité de vie des patients.
Fiches d’information :